Tutoriel n°3 (étude de texte/Terminale STT-STI) : expliquer des phrases du texte.

La deuxième question sur l’étude d’un texte philosophique, pour les séries technologiques, au baccalauréat, demande d’expliquer des phrases (ou des extraits de phrases) tirées du texte. En général, on vous posera 2 ou 3 questions.
Vous devez y répondre précisément et pour cela, bien comprendre ce que signifie expliquer une phrase.

1. Que signifie « expliquer » ?

Expliquer ne veut pas dire paraphraser

Beaucoup d’élèves et de candidats au baccalauréat confondent expliquer et paraphraser. Paraphraser consiste à réécrire ce qui est écrit dans le texte, avec d’autres mots et d’une manière souvent moins claire que celle de l’auteur du texte !
Par contre expliquer consiste à répondre à la question « pourquoi ?  » et donc à donner des arguments pour justifier ce qui est affirmé.

Par exemple, quand vous demandez des explications à quelqu’un, vous ne serez pas satisfait, s’il se contente de vous redire ce qu’il a dit ou ce qu’il a fait ! Vous attendez de lui qu’il vous donne des explications, c’est-à-dire qu’il argumente, qu’il justifie ce qu’il a dit ou ce qu’il a fait.

Comment expliquer efficacement une phrase ?

– Commencez par repérer l’endroit du texte où elle se situe, afin de bien la situer, dans les étapes de la réflexion de l’auteur;
– Repérez, dans le reste du texte, des mots ou des expressions qui y renvoient;
– Définissez les termes clefs qui la composent;
– Trouvez le maximum d’arguments que l’auteur du texte pourrait vous donner, si vous pouviez l’interroger : « Pourquoi affirmez-vous cela ? Justifiez ! »
– Vous pouvez illustrer vos propos par un exemple. Cependant, faites attention à ce que votre exemple ne remplace par vos arguments.

Pour aller plus loin

Si vous avez donné de bonnes explications, vous pourrez ensuite émettre un avis critique ou faire apparaître une difficulté, à propos de ce que l’auteur affirme. Le correcteur sera ainsi satisfait de voir que vous avez non seulement un esprit d’analyse, mais aussi un esprit critique.

2. Exemple d’application

Ne va jamais croire qu’un homme qui s’accroche au bien-être matériel puisse être heureux. Celui qui tire sa joie de ce qui vient du dehors s’appuie sur des bases fragiles. La joie est entrée ? Elle sortira. Mais celle qui naît de soi est fidèle et solide. Elle croît sans cesse et nous escorte jusqu’à la fin. Tous les autres objets qui sont communément admirés sont des biens d’un jour. « Comment ? On ne peut pas en tirer utilité et plaisir ? » Personne ne dit cela. Mais à condition que ce soient eux qui dépendent de nous et non le contraire.Tout ce qui relève de la Fortune (1) est profitable, agréable, à condition que le possesseur se possède aussi et ne soit pas asservi à ses biens. En effet, ceux qui pensent que c’est la Fortune qui nous attribue le bien ou le mal se trompent. Elle accorde juste la matière des biens et des maux, et les éléments de base destinés chez nous à tourner au mal ou au bien. L’âme, en effet, est plus puissante que la Fortune. Pour le meilleur ou pour le pire, elle conduit elle-même ses affaires. C’est elle qui est responsable de son bonheur ou de son malheur.
SENEQUE
(1) la Fortune : déesse personnifiant la chance, bonne ou mauvaise.

Voici les questions qui étaient posées, sur le texte, à la session du baccalauréat où il a été donné :

a) Quelle différence y a-t-il entre la joie tirée de « ce qui vient du dehors » et « celle qui naît de soi » ? Expliquez cette différence. Précisez en quoi le « bien-être matériel » relève de « ce qui vient du dehors » ;
b) Expliquez : « Personne ne dit cela. Mais à condition que ce soient eux qui dépendent de nous et non le contraire » ;
c) Expliquez : « L’âme (…) est plus puissante que la Fortune ».

Répondons séparément à chacune de ces questions :

a) Quelle différence y a-t-il entre la joie tirée de « ce qui vient du dehors » et « celle qui naît de soi » ? Expliquez cette différence. Précisez en quoi le « bien-être matériel » relève de « ce qui vient du dehors » ;

Pour Sénèque, la différence entre la joie « qui vient du dehors » et « celle qui naît de soi » est que la première est fragile et éphémère, alors que la seconde est solide et durable.

En effet, la joie est un sentiment positif, qui est causé par la satisfaction que nous éprouvons, vis-à-vis de quelqu’un ou de quelque chose.

Or, la joie « qui vient du dehors » est procurée par la possession de biens matériels, dont nous pouvons être privés (par la perte, le vol) ou qui, de toute façon ne sont pas durables : ils finissent par s’user ou par se casser. De même, notre joie de les avoir, dans un premier temps, laisse souvent place, par la suite, à la lassitude et au désir d’acquérir autre chose.

Par contre, la joie « qui naît de soi » est celle que nous éprouvons, quand nous considérons nos qualités propres, c’est-à-dire celles que notre âme possède. Ce sont des connaissances et des vertus, comme le courage, la tempérance, la justice.

Ces qualités définissent notre moi : nous les avons acquis à force de travail sur nous-mêmes. Nous pouvons même les améliorer sans cesse et donc augmenter la joie que nous ressentons, quand nous y pensons.

Par contre, les biens matériels viennent de l’extérieur, car ce sont des objets fabriqués par d’autres, pour nous assurer un certain confort de vie. Ils n’ont de valeur à nos yeux que par leur utilité, qui leur a été attribuée, par la société. Par exemple, dans les sociétés occidentales, nous considérons que les chaises nous permettent de nous asseoir confortablement, alors que dans d’autres sociétés, elles sont inutiles.

De plus, le bien-être matériel relève de ce qui est du dehors, car il est l’objet du jugement des autres. En effet, l’opinion admire et envie en général les possessions des gens riches, car elles sont censées leur apporter un maximum de confort.

b) Expliquez : « Personne ne dit cela. Mais à condition que ce soient eux qui dépendent de nous et non le contraire » ;

Sénèque répond à l’objection d’un interlocuteur imaginaire, qui semble attaché à la possession de biens matériels et estime qu’ils nous procurent de l’utilité et du plaisir. Sénèque ne rejette pas les avantages que procurent les biens matériels. Mais, il subordonne leur possession à une condition : « que ce soient eux qui dépendent de nous et non le contraire ». Cela signifie que nous ne devons pas nous rendre dépendants des biens matériels, au point de ne plus pouvoir nous en passer et de devenir malheureux, dans le cas où nous les perdrions.

Ce sont eux qui doivent dépendre de nous. Cette expression est une image qui signifie que la possession des biens matériels dépend de notre choix, de notre volonté : nous les avons parce qu’ils nous sont utiles et qu’il nous procurent un certain confort, mais nous sommes aussi assez forts psychologiquement, pour nous en passer, si nous ne pouvons pas faire autrement.

c) Expliquez : « L’âme (…) est plus puissante que la Fortune ».

En effet, notre force psychologique vient de notre âme qui est la faculté qui nous permet de penser, d’émettre des jugements sur ce qui arrive à nous-même et aux autres. Par contre, la Fortune désigne la chance, c’est-à-dire ce qui fait que les choses arrivent, comme nous le souhaitons ou non, mais indépendamment de nos décisions. Nous ne pouvons donc pas entièrement contrôler ce qui nous arrive. Par contre, nous pouvons, grâce à notre âme, contrôler les jugements que nous exprimons sur ce qui arrive.

Par exemple, quelqu’un qui perdra ses biens, ne se lamentera pas, car cela ne les fera pas revenir. Par contre, il considèrera sa situation avec neutralité et calme ou même se réjouira de n’avoir pas tout perdu. Ainsi, un homme avait perdu dans l’incendie de sa maison sa bibliothèque, ainsi que des manuscrits qu’il avait écrit. Des années d’efforts avaient été réduits à néant par le feu. Mais, cet homme n’était pas triste, car il n’avait pas perdu ce qu’il avait acquis, grâce à ses années de travail : l’expérience et la maîtrise des sujets qu’il avait traités dans ses livres. Tout cela lui était resté, comme des biens intérieurs.

3. Exercice d’entraînement

Vous pouvez faire cet exercice dans la zone des commentaires (ou sur la page « me contacter », si vous ne voulez pas que votre travail paraisse sur le site). Un corrigé vous sera proposé dans le Tutoriel n°4.

Répondez aux questions suivantes, sur le texte de John Stuart MILL (proposé plus bas).

a) Expliquez : « Contraindre quiconque pour son propre bien, (…) ne constitue pas une justification suffisante »
b) Quelle différence y a-t-il entre « faire des remontrances, (…) raisonner, (…) persuader ou (…) supplier » et « contraindre ou (…) causer du tort » ?
c) Expliquez : « Le seul aspect de la conduite d’un individu qui soit du ressort de la société est celui qui concerne les autres ».

4. Corrigé de l’exercice du Tutoriel n°2

Avez-vous bien fait l’exercice du Tutoriel n°2, avant de lire sa correction ?

(1) La seule raison légitime que puisse avoir une communauté pour user de la force contre un de ses membres est de l’empêcher de nuire aux autres. (2) Contraindre quiconque pour son propre bien, physique ou moral, ne constitue pas une justification suffisante. (3) Un homme ne peut pas être légitimement contraint d’agir ou de s’abstenir sous prétexte que ce serait meilleur pour lui, que cela le rendrait plus heureux ou que, dans l’opinion des autres, agir ainsi serait sage ou même juste. (4) Ce sont certes de bonnes raisons pour lui faire des remontrances, le raisonner, le persuader ou le supplier, mais non pour le contraindre ou lui causer du tort s’il agit autrement. (5) La contrainte ne se justifie que lorsque la conduite dont on désire détourner cet homme risque de nuire à quelqu’un d’autre. (6) Le seul aspect de la conduite d’un individu qui soit du ressort de la société est celui qui concerne les autres. (7) Mais pour ce qui ne concerne que lui, son indépendance est, de droit, absolue. (8) Sur lui-même, sur son corps et son esprit, l’individu est souverain.

John Stuart MILL

Thèse du texte :

La contrainte que la société exerce sur l’un de ses membres ne peut être légitimée que si elle sert à l’empêcher de porter atteinte à l’intégrité physique ou morale d’autrui, mais en aucun cas, si elle est appliquée, pour son propre bien.

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