L’explication d’un texte philosophique est un exercice qui vous demande, comme son nom l’indique, d’expliquer les idées d’un texte. Mais que signifie ici « expliquer » ? Et comment procéder, pour arriver à faire une bonne explication de texte, sans tomber dans la paraphrase ? La réussite de votre explication repose sur l’art de vous poser les bonnes questions, à propos du texte. Dans ce tutoriel, nous allons voir ensemble, lesquelles. Un second tutoriel sera consacré à l’art de trouver les bonnes réponses !
Expliquer ne veut pas dire paraphraser
Le piège dans lequel beaucoup d’élèves tombent, dans l’exercice d’explication de texte, consiste à paraphraser les idées du texte, au lieu de les expliquer.
Paraphraser consiste à redire ce que l’auteur écrit déjà dans le texte et, en général, de manière moins précise et moins élégante !
Expliquer consiste, au contraire à justifier les idées que l’auteur affirme, c’est-à-dire à imaginer les arguments, qu’il proposerait, si vous pouviez l’interroger.
Faites ici très attention au double sens du terme « expliquer » ! En général, on explique à quelqu’un ce qu’il n’a pas compris, en utilisant d’autres mots (par exemple, s’il ne comprend pas le sens d’un terme). Ce premier sens du verbe « expliquer » correspond à « paraphraser ».
Mais, le verbe « expliquer » a un autre sens. Si vous demandez à quelqu’un de vous expliquer son comportement, vous ne lui demandez pas de faire le récit de ce qu’il a fait, mais bien de justifier ses actions. C’est en ce sens qu’il faut comprendre le verbe « expliquer », dans l’exercice d’explication d’un texte philosophique.
Moins le texte contient d’explications et mieux c’est !
Paradoxalement, il est plus facile d’expliquer un texte, qui contient, lui-même, peu d’explications, qu’un texte qui en contient beaucoup ! En effet, dans ce dernier cas, il vous faudra trouver des arguments aux explications données par l’auteur. Vous devrez remonter, en quelque sorte au « pourquoi du pourquoi » !
Ainsi, ne soyez pas déconcerté(e), si l’auteur donne peu d’explications. Dites-vous que cela va rendre votre travail d’explication plus facile, même s’il vous sera peut-être plus difficile, au départ, de comprendre les idées du texte.
Comment expliquer un texte philosophique ?
Pour éviter de tomber dans le piège de la paraphrase, je vous conseille de procéder par la méthode que j’appelle « questions-réponses ». Attention, je précise que cette méthode vous sert, pour votre travail au brouillon et que vous ne devrez pas faire apparaître les questions, dans la copie que vous rendrez.
Cette méthode consiste à vous poser des questions qui vous obligent à trouver des arguments sur les idées du texte. Ces questions sont de deux sortes :
1) Les questions portant sur la définition des termes clefs du texte
2) Les questions de la forme « pourquoi ? » et « comment ? » |
1) Les questions portant sur la définition des termes clefs du texte
La définition des termes clefs du texte vous aide à comprendre les idées du texte et à les expliquer. Ces termes à définir sont en général les notions que vous aviez au programme pendant l’année et des termes s’y rapportant. Ce sont également des termes que vous considérez comme essentiels, dans l’exposé des idées de l’auteur.
2) Les questions de la forme « pourquoi ? » et « comment ? »
Ces questions vous incitent à aller chercher des arguments et des explications que l’auteur ne donne pas dans le texte, à moins, comme nous l’avons vu, plus haut, que son propos soit explicatif. Dans ce cas, repérez bien les passages du texte introduits par des termes comme « en effet », « parce que », « car », etc. Ils vous indiquent la présence d’explications par l’auteur et vous avertissent que, pour ces passages, le niveau de difficulté de votre explication va s’élever, puisqu’il vous faudra trouver des arguments aux arguments donnés par l’auteur !
Exercice d’application
Texte d’Aristote (extrait de La Politique I,2) Le texte, présenté d’un seul tenant, se trouve dans le Tutoriel n°2
« Il est évident que l’homme est un animal politique, bien plus que n’importe quelle abeille ou n’importe quel animal grégaire. |
Questions :
– Pourquoi l’homme est-il un « animal politique » ? (Pourquoi a-t-il besoin de vivre en société ?)
– En quoi est-ce une évidence ?
– Pourquoi Aristote précise-t-il : « bien plus que » ?
Car, nous le disons souvent, la nature ne fait rien en vain. |
Question :
– Que signifie l’expression : « la nature ne fait rien en vain » ?
Et seul parmi les animaux, l’homme est doué de parole. |
Question :
– Qu’est-ce que la parole ?
Certes la voix sert à signifier la douleur et le plaisir et c’est pourquoi on la rencontre chez les autres animaux (car leur nature s’est hissée jusqu’à la faculté de percevoir douleur et plaisir et de se signifier mutuellement). |
Questions :
– Quelles différences y a-t-il entre la « voix » et la « parole » ?
– Qu’est-ce que la douleur et le plaisir ?
– Pourquoi la voix sert-elle à exprimer la douleur et le plaisir ? En quoi les animaux en ont-ils besoin ?
– En quoi la voix est-elle suffisante, pour exprimer la douleur et le plaisir ? (Pourquoi n’a-t-on pas nécessairement besoin de la parole, pour cela ?)
Mais la parole existe en vue de manifester l’utile et le nuisible, puis aussi, par voie de conséquence, le juste et l’injuste. |
Questions :
– Qu’est-ce que l’utile et le nuisible ?
– Qu’est-ce que le juste et l’injuste ?
– En quoi a-t-on besoin de la parole pour les manifester ? (Et en quoi la voix n’est-elle pas adaptée, pour cela ?)
C’est ce qui fait qu’il n’y a qu’une chose qui soit propre aux hommes et les sépare des autres animaux : la perception du bien et du mal, du juste et de l’injuste et autres notions de ce genre ; et avoir de telles notions en commun, voilà ce qui fait une famille et une cité. » |
– Qu’est-ce que le bien et le mal ?
– Qu’est-ce que le juste et l’injuste ?
– Qu’entend-il par « autres notions de ce genre » ? »
– Qu’est-ce qu’une « famille » ? une « cité » ?
– Pourquoi avoir de telles notions en commun, fait-il une famille et une cité ? (En particulier comment comprendre l’expression : « c’est ce qui fait »?)
Exercice à faire
Vous pouvez faire cet exercice dans la zone des commentaires (ou sur la page « me contacter », si vous ne voulez pas que votre travail paraisse sur le site). Un corrigé vous sera proposé dans le Tutoriel n°4.
Trouvez des questions de définition et d’explication, sur le texte de Bergson (donné, juste en dessous, dans le corrigé de l’exercice du Tutoriel n°2)
Corrigé de l’exercice du Tutoriel n°2
Avant de lire le corrigé, je vous invite à faire l’exercice du Tutoriel n°2
Dégagez la thèse et la problématique du texte de Bergson :
« Qu’arrive-t-il quand une de nos actions cesse d’être spontanée pour devenir automatique ? La conscience s’en retire. Dans l’apprentissage d’un exercice, par exemple, nous commençons par être conscients de chacun de nos mouvements que nous exécutons, parce qu’il vient de nous, parce qu’il résulte d’une décision et implique un choix ; puis, à mesure que ces mouvements s’enchaînent davantage entre eux et se déterminent plus mécaniquement les uns les autres, nous dispensant ainsi de nous décider et de choisir, la conscience que nous en avons diminue et disparaît. Quels sont, d’autre part, les moments où notre conscience atteint le plus de vivacité ? Ne sont-ce pas les moments de crise intérieure, où nous hésitons entre deux ou plusieurs partis à prendre, où nous sentons que notre avenir sera ce que nous l’aurons fait ? Les variations d’intensité de notre conscience semblent donc bien correspondre à la somme plus ou moins considérable de choix ou, si vous voulez, de création, que nous distribuons sur notre conduite. Tout porte à croire qu’il en est ainsi de la conscience en général. Si conscience signifie mémoire et anticipation, c’est que conscience est synonyme de choix. |
Réponses :
Problématique du texte : Comment définir la conscience, sans l’inclure dans sa propre définition, puisqu’elle est à la base de tous nos actes de connaissance ?
Thèse du texte : Notre conscience est d’autant plus présente que notre action implique un choix et contient de l’hésitation, alors qu’elle est comme « absente », dans les actions automatiques. Notre conscience se caractérise donc par la notion de choix.
Remarque à propos de la problématique . Bergson définit, dans ce texte, la conscience, en partant de l’observation de ses variations d’intensité. Une problématique « plate » aurait été : « Qu’est-ce que la conscience? » ou « Comment définir la conscience? ». Pour problématiser la question, il faut que vous arriviez à construire un problème, à propos de la définition de la conscience. J’ai choisi ici le problème du cercle de la définition : comment faire pour ne pas définir la conscience par elle-même ?
Il y a sûrement d’autres possibilités. Vérifiez toujours néanmoins que le problème que vous allez soulever est bien traité dans le texte !
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