Dans un précédent article, je vous ai parlé de ma méthode pour corriger les copies pendant l’année. L’épreuve du baccalauréat approchant, je voudrais ici vous exposer la méthode que j’utilise pour corriger le paquet de copies que nous allons bientôt recevoir et que nombre de collègues redoutent. La méthode que j’utilise est assez proche de la précédente : la seule différence est qu’elle tient compte d’un paramètre supplémentaire, à savoir gérer le nombre de copies (qui est, en moyenne de 140).
L’attitude à avoir face au paquet de copies
Beaucoup de collègues se découragent eux-mêmes, devant leur paquet de copies, en se focalisant sur des aspects négatifs : le nombre assez impressionnant de copies (si on le compare à d’autres matières, par exemple), l’épaisseur même du paquet, que certains ne manquent pas de relever (!), ainsi que le nombre de jours dont nous disposons pour corriger et qui s’est réduit d’année en année.
De plus, de nombreux collègues se fixent eux-mêmes des limites (« au bout de 10 copies je sature ! »), en se persuadant qu’elles sont indépassables.
J’ai eu moi-même, pendant de nombreuses années, la même attitude, avant de m’apercevoir que nous avons la capacité d’aller bien au-delà de ces limites et que toutes nos certitudes à propos du fameux paquet de copies du baccalauréat ne sont que des histoires que nous nous racontons !
Avant de vous exposer précisément ma méthode, je voudrais juste faire une comparaison avec les performances sportives. Si vous êtes un sportif régulier, vous serez capable de courir 10 km. Cependant, des sportifs plus entraînés arrivent à faire un marathon (42 km) : ce qui est déjà un belle performance ! Oui, mais d’autres arrivent à couvrir une distance de 100 km ! Vous pensez que le corps humain a atteint ses limites ? Vous vous trompez ! Il existe, aux Etats-Unis, une épreuve sportive qui consiste à courir 1000 miles (soit environ 1610 km), en mettant le moins de temps possible. Le record, à ma connaissance, est d’un peu plus de 11 jours !
Pour résumer, si certains êtres humains ont de telles capacités physiques, il est également possible d’avoir la capacité mentale de corriger un grand nombre de copies, sans saturer. De plus, cette capacité, contrairement à la précédente, ne demande pratiquement aucun entraînement et ne comporte aucun risque de blessure ! Et puis, si vous observez bien, cette capacité vous l’avez déjà en vous, puisque vous l’avez déjà mise en oeuvre, lorsque vous avez passé les concours de l’enseignement. Rappelez-vous ! Vous avez bien passé 5 heures, 6 heures et même 7 heures de suite à composer !
Mon organisation, pour éviter la saturation
Mon but est d’éviter le découragement, la procrastination et la saturation. Voici comment je procède :
- 1. Je me mets au travail, dès que je reviens chez moi, après avoir été cherché les copies.
- 2. Je trie les copies, par sujets et je commence par celui qui a été traité par le plus grand nombre.
- 3. Je range les autres paquets et je divise celui par lequel je commence en petits paquets de dix, mis les uns au-dessus des autres. Je le place sur ma table de travail, sur le devant à droite.
- 4. Je prend le premier paquet de 10 copies et le place devant moi, comme s’il formait un livre : quand une copie est corrigée, je la fais basculer à gauche et j’enchaîne immédiatement sur la suivante.
- 5. Je me donne environ 60 minutes (en faisant déclencher la sonnerie d’un minuteur, selon la méthode Pomodoro , pour corriger chaque paquet de 10. Quand il est terminé, je le place, sur ma table de travail, sur le devant à gauche.
- 6. Je prends ensuite 5 minutes de pause. Le but premier est de déconnecter complètement le cerveau de tout travail intellectuel, afin qu’il n’accumule pas de fatigue psychologique. Le second but est de bouger le corps, pour éviter la fatigue physique et notamment le mal de dos, qui risque de se faire sentir au bout de quelques heures de correction.
- 7. J’enchaîne sur le paquet de 10 suivant, et ainsi de suite.
Ainsi, pendant ce temps de pause, je fais des mouvements de yoga : ils permettent de se concentrer sur le corps et la respiration et étirent le dos !
Le « secret » : la visualisation mentale préalable
La méthode que je vous ai exposée repose sur une organisation quasi militaire et sa réussite dépend d’un autre élement clef : la motivation. En effet, il faut non seulement arriver à se motiver, pour se mettre à corriger son paquet de copies, mais aussi rester motivé, pour tenir le rythme de correction. Cette motivation, je la puise dans une méthode dont j’ai exposé les bases, dans un article précédent : la visualisation mentale.
Pour en rappeler rapidement les principes, la visualisation mentale consiste à vous projeter sous formes d’images mentales, le « film » d’une action que vous allez faire, avec le maximum de détails, mettant en jeu le maximum de vos sens. Quand il sera temps de faire réellement l’action, vous vous apercevrez que vous êtes dans un état de motivation telle que « rien ne pourrait vous arrêter ».
Il y a différentes façon de procéder, pour visualiser l’action, mais le plus simple est d’imaginer que vous avez une caméra sur le front : dans votre « film », vous voyez donc tout ce qui se passe devant vous, sans vous voir entièrement vous-même.
Voici comment je procède :
- 1. Je fais ma visualisation mentale, la veille ou l’avant veille du jour où je vais chercher les copies.
- 2. Je démarre le film au moment où je sors de chez moi, pour aller chercher les copies.
- 3. Je visualise ensuite le retour, le tri des copies et la correction du premier petit paquet. Bien entendu, le film se déroule beaucoup plus vite que la réalité. L’important est de visualiser le maximum de détails : prendre une copie, visualiser la première page, la tourner, souligner des passages, tourner les autres pages, revenir à la première page et mettre le commentaire, puis passer à la copie suivante.
- 4. Je déroule la suite du film beaucoup plus vite pour les petits paquets de 10 restants, puis pour les autres sujets.
- 5. Enfin, je termine le film : la correction de la dernière copie, le report des notes sur les bordereaux et …. la joie finale et le soulagement d’avoir accompli un bon travail !
Les résultats
La méthode que je vous ai exposée vous permet d’enchaîner la correction de 10 copies, sans saturer. Ensuite, c’est à vous de décider combien de paquets de 10 vous allez enchaîner à la suite (avec toujours le temps de pause entre chaque). Ramené en nombre d’heures, ce travail correspond à un total de 15 à 20 h de correction. Cette fourchette tient compte des temps plus ou moins longs de pause que vous prendrez. Elle tient compte aussi du nombre de copies que vous pouvez corriger en une heure. Mais à mon sens, vous ne devez pas aller en dessous de 7.
Vous pouvez répartir ce temps total de correction de différentes manières : soit le concentrer sur un nombre minimun de jours, soit au contraire le répartir sur le nombre total de jours dont vous disposez. A vous de voir ! Mais rappelez-vous : vous ne subissez pas ; c’est vous qui décidez !
Si vous avez des questions à me poser sur ma méthode, n’hésitez pas à me contacter. Bon courage à vous, pour vos corrections !
Intéressante comme expérience !
Merci à vous ! Je viens de l’appliquer de nouveau avec succès, pour les 134 copies que j’avais à corriger, pour le bac 2016. Les cinq minutes de pause permettent vraiment d’évacuer la saturation qui s’accumule, au bout de la correction de chaque paquet de 10. Ensuite, il faut s’accrocher un peu plus entre la 100e et la 120e. Mais le résultat est là : 67 copies corrigées le premier jour et les 67 autres le deuxième !